Source : wikipedia
Le 25 janvier 1998, alors qu’ils prennent part à une excursion de plongée sous-marine au large des côtes australiennes, les Lonergan disparaissent mystérieusement. Un mois plus tard, deux combinaisons de plongée et un message inquiétant font leur apparition au large d’une plage du Queensland
« Help us before we die ! », “Sauvez-nous avant que nous mourions !”
Mais alors que l’agence chargée de l’excursion est poursuivie pour négligence, l’affaire prend une tout autre tournure après la découverte des deux journaux intimes du couple.
Oubliés en mer ? Dévorés par les requins ? Qu’est-il réellement arrivé aux Lonergan ?
C’est ce que je vous propose de découvrir avec moi à travers notre affaire criminelle d’aujourd’hui.
Suva, Fidji, 28 décembre 1997 : Noël et anniversaire sous les tropiques
Assis à côté du sapin en plastique acheté à la sauvette dans le SPAR du coin, Tom Lonergan défroisse le papier cadeau du dernier paquet tendu par son épouse. Avant d’ôter les morceaux d’adhésif rouge aux motifs de guirlandes, Tom agite le paquet pour en deviner le contenu, une habitude qu’il a gardé depuis son enfance.
— Allez, vas-y, ouvre-le !
— J’ai pas de bol de fêter et Noël et mon anniversaire en l’espace de deux jours, on t’offre un cadeau pour les deux occas’ !
— Arrête de grincher et regarde plutôt ce qu’il y a à l’intérieur !
Des lunettes de plongée Scubapro Synergy !
Souriant d’une oreille à une autre, Tom enlève ses grosses lunettes de vue pour faire les essayages. Face à lui, Eileen est aux anges. Elle ne peut s’empêcher de rire lorsqu’elle voit son mari mimer la nage d’un dauphin sur le plancher de leur petit salon.
— Ça ressemble plus à une grosse tortue marine échouée sur un rivage, ton numéro d’apnée !
— Quel splendide cadeau, ma chérie, merci du fond du cœur ! Souffle Tom, le visage enfoui dans le tapis pour simuler l’apnée.
— Tu as largement mérité ton certificat de plongée, ce n’est pas rien, à présent plus d’excuses pour aller s’entraîner en mer !
— En mer ? Tu veux dire à la piscine ?
Tom range soigneusement son cadeau dans le paquet et change de sujet.
— Ouf, je suis content que la mission soit terminée ici, j’ai hâte de quitter les Fidji et de rentrer à la maison !
— J’ai demandé à maman de nous préparer une demi-douzaine de tartes aux pommes et de les stocker dans le frigo pour notre arrivée !
— Avec une boule de glace à la vanille qui fond de partout…
— Et une sauce caramel-beurre salé…
Tom et Eileen Lonergan forment un couple qui s’entend bien, un couple sans histoires et sans drames. Mariés depuis dix ans, sans enfants, ils s’apprécient réciproquement et aiment faire énormément d’activités ensemble.
Thomas Joseph Lonergan est né le 28 décembre 1964 et Eileen Cassidy Hains, le 13 mars 1969, à Bâton Rouge dans l’État de Louisiane. Ils sont tous les deux issus de familles américano-irlandaises où la foi catholique est très présente, surtout dans la famille de Tom.
Rencontrés à la Louisiana State University où ils poursuivaient leur cursus supérieur, ils tombent rapidement amoureux et se marient à Jefferson au Texas le 24 juin 1988.
Source : allthatsinteresting
Âgée de vingt-neuf ans, Eileen est une jolie brune à la physionomie sage et avenante, elle s’habille toujours avec une grande sobriété et ne se maquille jamais, préférant sûrement être tout le temps au naturel.
De son côté, Tom, trente-quatre ans, est un jeune homme à grosses lunettes, au look de surdoué et souffrant d’une calvitie qu’il l’a rendu précocement chauve.
Eileen est d’un tempérament entier, enjoué, aventurier, Tom est plutôt casanier, timide, peu sûr de lui, gêné par ses lunettes à verres grossissants qui ont toujours constitué un frein à sa vie sociale pendant le lycée, et plus tard à l’université. L’énergie communicative d’Eileen lui a redonné goût à l’existence et confiance en lui alors qu’il était persuadé qu’aucune fille ne s’intéresserait jamais à lui.
Eileen, qui a toujours été plus téméraire que son mari, est une excellente nageuse. Passionnée de plongée en apnée qu’elle pratique depuis ses quinze ans, elle a d’ailleurs participé à de nombreux tournois régionaux et nationaux aux États-Unis puis en Nouvelle-Zélande où elle s’est installée par la suite dans le cadre de son travail.
Ses efforts en la matière payent lorsqu’elle reçoit le certificat de « Master Scuba Diver », l’un des plus prestigieux et qui permet à son détenteur de devenir instructeur professionnel de plongée. Rapidement gagné par la passion de son épouse pour le monde de la mer, Tom suit son cheminement, persévère et obtient au bout de trois ans le précieux sésame.
En 1994, le couple Lonergan s’embarque pour une mission humanitaire, d’abord en Afrique, puis dans le Pacifique Sud pour le compte de l’American Peace Corps, spécialisée dans les œuvres caritatives.
Transféré aux îles Fidji, le couple se heurte pour la première fois aux populations défavorisées de cette ancienne colonie de la couronne britannique. À Tuvalu, ils enseignent les mathématiques et l’anglais aux enfants, distribuent des goûters, des cartables, des cahiers et des feutres et s’occupent de campagnes de sensibilisation contre le sida en faisant des exposés pour vanter les bienfaits des préservatifs.
À cette époque, leur boulot occupe l’essentiel de leur temps, sans compter les séminaires auxquels ils sont tenus de faire acte de présence.
En décembre 1997, le travail bénévole du couple Lonergan touche à sa fin et l’un comme l’autre ne songe pas à renouveler son contrat, du moins pas tout de suite. À dire vrai, d’autres projets leur occupent la tête en ce moment.
Voyager, parcourir le monde, rencontrer de nouvelles populations, goûter à d’autres cuisines locales, écouter la sonorité d’autres langues, voilà ce que veulent Tom et Eileen. Quand tout cela sera terminé, peut-être qu’ils envisageront aussi de fonder une famille, qui sait !
Ayant réussi à mettre assez d’argent de côté pour réaliser leur rêve d’aventure, les Lonergan se mettent aussitôt à compter les jours qui les séparent du début de leur voyage. Ils se sont fixés une période de trois mois avant de rentrer en Louisiane. Première étape qui n’est pas des moindres : le nord de l’Australie.
Le 18 janvier 1998, à bord d’un avion de la compagnie Qantas Airlines, Tom et Eileen voient défiler sous leurs yeux Suva et ses habitations typiquement hindoues, c’est fini tout cela. À présent, cap sur le Queensland, la plus belle région de l’Australie avec ses plages d’eau turquoise, son extraordinaire faune marine et ses paysages paradisiaques. La région doit surtout sa renommée mondiale à ses récifs de la Grande Barrière de corail, désormais patrimoine naturel protégé, où la pêche est strictement règlementée.
Dans les profondeurs des eaux tièdes du Pacifique Sud, un autre monde extraordinaire subsiste : poissons clowns, baleines, raies manta, tortues, requins gris et requins bouledogue.
Le secteur touristique est d’ailleurs l’un des plus importants de la région du nord du pays. La ville principale, Cairns, où descendent la plupart des touristes, mais aussi des ports de plaisance comme Port Douglas et Indian Head, sont visités chaque année par près de deux millions de personnes venues du monde entier et principalement d’Europe.
Surtout, la plupart viennent pour l’activité la plus populaire : la plongée sous-marine. Et pour cause, la région peut se targuer d’avoir les plus beaux sites naturels du monde avec une eau avoisinant les vingt-cinq degrés tout au long de l’année.
À leur arrivée à Cairns, Tom et Eileen réservent dans un petit hôtel sans prétention mais néanmoins très chaleureux. Beaucoup de touristes comme eux descendent dans le même endroit, et le soir venu, tout le monde se croise dans l’un des restaurants de la petite ville avant de terminer la soirée dans l’un des pubs locaux.
Les vacances s’annoncent bien.
Le vendredi 23 juillet 1993, les Lonergan se rendent dans l’une des agences touristiques de Cairns pour réserver une excursion sous-marine pour le dimanche, soit deux jours plus tard. De retour à l’hôtel, ils commencent à songer à toutes les merveilles qui les attendent, l’excitation est tellement forte qu’ils en ont du mal à dormir complétement.
Tôt le matin du dimanche 25 janvier 1998, un bus navette de la compagnie de transport BTS vient les chercher à leur hôtel pour les emmener à Port Douglas, où les attend l’un des bateaux de la compagnie Outer Edge.
Outer Edge, comme dix autres agences du même acabit, affichent complet toute l’année, les réservations se font généralement des mois à l’avance, les Lonergan peuvent donc se considérer chanceux d’avoir réussi à trouver une place en s’y prenant tardivement.
Chaque jour, l’Outer Edge réalise des allers retours entre Port Douglas et les récifs de Tongue Reef, Batt Reef et bien sûr Saint Crispin, qui est LE spot où il faut aller absolument et le plus densément fréquenté aussi.
La journée s’annonce chaude, le puissant soleil australien est déjà haut dans le ciel. Sujette aux coups de soleil malgré un séjour prolongé aux Fidji, Eileen ne peut s’empêcher de se tartiner de la tête aux pieds d’une crème à indice de protection élevé et contraint son mari à en faire de même, même s’il dit que cette pâte blanche et odorante lui donne mal au crâne. Sur le quai, une vingtaine d’autres personnes qui ont souscrit à la même excursion leur envoie des « salut » et des « bonjour » d’un signe de la main. Les conversations s’engagent rapidement :
« Nous venons de Melbourne » « Et nous d’Auckland en Nouvelle-Zélande » « Ah, vous êtes Américains ? Quelle coïncidence, je crois qu’un couple newyorkais est aussi du voyage ! »
Face au petit groupe de touristes, le capitaine du bateau commence à faire les présentations : lui-même, le capitaine et skipper Geoffrey Ian « Jack » Nairn et le reste de l’équipage, composé de cinq autres marins et de trois instructeurs.
Le capitaine Nairn est l’archétype même du surfeur australien : grand, blond, le teint basané pour avoir résidé dans un endroit où le soleil tape 365 jours par an, il porte un simple débardeur, un short, des Havaianas et une paire de lunettes noires un peu démodées.
L’un des membres de l’équipage se met à faire le décompte des passagers pour procéder à l’embarquement : vingt-six au total, après quoi, le capitaine Nairn commence à dresser l’itinéraire de l’excursion ; elle doit se dérouler dans trois spots différents : Saint Crispin Reef, Agincourt Reef et enfin Fish City, surnommé ainsi à cause de sa faune marine abondante.
Il donne aussi ses recommandations de base : pas de boisson alcoolisée à bord, pas de comportement susceptible de compromettre le bon déroulement des opérations, les touristes doivent écouter et suivre à la lettre les conseils des instructeurs de plongée.
Au milieu du petit groupe, Eileen et Tom se jettent un regard amusé et entendu.
La sortie commence à 8 h 30 du matin, le retour à Port Douglas est prévu pour 16 h 30. Saint Crispin est situé à vingt-deux kilomètres de la côte.
L’aventure commence !
Source : newsport
Le groupe de touristes est immédiatement grisé par l’air marin et l’étendue bleue du Pacifique. Partout, l’eau est d’un bleu turquoise de rêve, quelques dauphins font déjà leur apparition, réalisant des cabrioles dans les airs qui font pousser des cris de joie à la compagnie et dégainer les appareils photos.
Arrivé au premier récif, le bateau jette l’ancre et s’immobilise. Des membres de l’équipage commencent à sortir le matériel et les combinaisons de plongée. À bord, tout le monde est pris d’une euphorie que confère ce genre d’expédition : certains, bien qu’excellents nageurs, font leur baptême de plongée, d’autres comme Eileen et Tom Lonergan sont très expérimentés.
Néanmoins, le capitaine Nairn et ses coéquipiers ne manquent pas de le rappeler : interdiction formelle de descendre au-dessous des douze mètres règlementaires sinon la pression sera trop excessive et cela risque d’engendrer des problèmes. La prudence est de mise, inutile de le rappeler.
10 h 30, première sortie avec un retour à bord prévu dans trente minutes. Tout le monde règle son chronomètre. Debout sur les platebandes, les instructeurs supervisent le déroulement des opérations. Aidés de ces derniers, les Lonergan et les autres touristes enfilent leurs combinaisons de plongée et s’assurent qu’ils ont tout placé en ordre : tuba, harnais, tuyau d’air, gilet de stabilisation, bouteille d’air comprimé, soupape de gonflage et de purge. Ils sont prêts.
Chaussés de leurs grosses palmes, les plongeurs y vont deux par deux, Tom et Eileen ferment la marche. Les « splash » se succèdent.
Dans les profondeurs, un tout nouvel univers s’offre à leurs yeux et leur ouïe. Saint Crispin n’aurait donc pas volé son surnom de « Flower’s Garden », tant par sa beauté unique que par la variété d’algues et de coraux qu’il abrite.
Les vingt-six plongeurs se départagent en petits groupes de trois ou quatre, suivant les affinités et les liens, les Lonergan ne s’éloignent pas et restent à côté.
Il est onze heures quand tout le monde revient à bord de l’Outer Edge. Sur les tables à tréteaux installées à côté des banquettes, un menu de homards et de poissons frits les attend. On parle en même temps, chacun donnant ses premières impressions de l’aventure, de son émerveillement de la faune marine, des photos qu’il a pris.
— Dites Captain Nairn, vous savez si de grands blancs rôdent par ici ?
Le capitaine Nairn rajuste ses lunettes de soleil et répond d’un ton sans équivoque :
— D’après ce que j’en sais, pas vraiment. Ils préfèrent nager et chasser de l’autre côté du récif, là où les eaux sont beaucoup plus poissonneuses et froides.
— Moi j’ai lu dans un numéro du National Geographic que beaucoup de pêcheurs du coin avaient au moins un bras ou une jambe arrachée par un squale ! S’exclame une petite dame rousse aux airs apeurés.
Un frémissement parcourt le groupe.
— Mais non, rassure le capitaine Nairn en se raclant la gorge, c’est des histoires tout ça, les concurrents vous savez ce que c’est, savent plus quoi inventer pour dissuader les gens de venir à Port Douglas… Vous avez ma parole qu’aucun requin ne traîne par là.
Eileen, qui piochait des morceaux de calmar frit dans son assiette, donne un léger coup de coude à Tom, qui a suivi la conversation depuis le début, tous les sens en éveil.
— T’entends ça, Leen ?
— Encore une qui a trop regardé Spielberg, je dirais ! Lui dit-elle dans l’oreille pour le rassurer.
Après une trêve d’une heure, le groupe redescend encore dans les profondeurs pour la deuxième plongée de la matinée. À 13 h 00, ils retournent sur le bateau et prennent un copieux déjeuner.
À 14 h 00, le moment est venu pour faire la troisième et dernière plongée avant le retour sur la terre ferme.
Comme ce matin, les plongeurs commencent à descendre deux par deux, beaucoup plus enjoués et enhardis maintenant qu’ils en ont l’habitude. Profitant de ce moment d’agitation, Tom et Eileen prennent à part Katherine Traverso, l’instructrice en chef :
— Nous n’avons pas voulu parler devant le capitaine et les autres mais c’est que nous voudrions nous éloigner un peu du groupe pour nager en duo, faire notre propre truc…
— Qu’entendez-vous par « votre truc » ? S’exclame l’instructrice, vous savez très bien que c’est contre le règlement et…
— Nous sommes des plongeurs professionnels, coupe poliment Eileen, nous avons même une accréditation pour cela ! Tenez, voici nos PADI Open Water, vous n’avez absolument aucun souci à vous faire à ce niveau, nous serons de retour avant le signal, dans trente minutes comme a prévu le capitaine !
Katherine Traverso jette un regard circonspect au couple Lonergan ; il est vrai que dans les groupes d’excursion, il y a toujours des « éléments perturbateurs » et ces deux Américains semblent ne pas déroger à la règle. Néanmoins, après quelques hésitations et un énième coup d’œil aux certificats plastifiés, elle hoche la tête d’un air affirmatif en les rendant à leurs propriétaires.
— C’est bon, vous pouvez y aller, mais retour dans trente minutes !
Il est 15 h 00 lorsque le capitaine Nairn donne un coup de sirène signalant la fin de la journée d’expédition sous-marine. Les uns après les autres, tous les plongeurs commencent à remonter à la surface pour regagner le bateau. Aussitôt, l’un des membres de l’équipage, muni d’un calepin et d’un feutre noir, se met à faire le décompte des plongeurs : deux, quatre, huit, dix, quinze, vingt, vingt-six, le compte est bon, on peut aller récupérer l’ancre à présent.
Le capitaine donne alors l’ordre de remonter les échelles de la plate-bande arrière du bateau. Et tandis que tout le monde se déshabille pour enfiler des vêtements secs, l’un des marins plonge pour récupérer l’ancre. Après un dernier coup d’œil pour s’assurer que tout le monde est bien là, le capitaine Nairn démarre dans un grand fracas de moteur pour rentrer à Port Douglas.
Il est environ 16 h 30 quand tous regagnent la terre ferme. On descend sur le quai, on se salue, les plus généreux glissent des pourboires aux marins, et l’équipage procède au nettoyage du matériel de plongée et du bateau en prévision de l’excursion du lendemain.
Bien sûr, des distraits ont laissé des choses derrière eux : une paire de lunettes, une serviette, de l’écran total indice 60, des comprimés contre le mal de mer, mais il y a surtout un sac de voyage en toile, glissé sous l’une des banquettes, que l’un des instructeurs récupère pour l’ajouter à la liste des objets trouvés.
Il faut savoir que le capitaine Nairn et son équipage savent d’emblée qu’il est peu courant que les touristes reviennent récupérer les objets oubliés à bord, souvent par manque de temps ou de volonté, car rares sont ceux qui restent à Port Douglas plus d’une journée ou deux.
À l’instar de l’Outer Edge, toutes les agences d’excursions du coin possèdent au moins un hangar dont les étagères débordent de ces objets oubliés au débarquement, et ce sont de véritables cavernes d’Ali Baba : sacs, vêtements, serviettes, produits solaires, lunettes, montres, etc.
Alors que les plongeurs précédents ont tous regagné les navettes chargées de les conduire à leurs hôtels respectifs, il ne reste plus qu’un seul bus sur le quai, celui de la compagnie de transport BTS que Tom et Eileen ont pris le matin même pour se rendre de Cairns jusqu’à Port Douglas, et qui à présent est revenu les récupérer.
Norman Stigant, le chauffeur du bus, ne peut s’empêcher de regarder à chaque fois sa montre : mais où diable sont partis ces deux Américains ? S’ils ont décidé de changer de plan, ils auraient dû au moins prendre la peine de prévenir, en bonnes gens civilisés, mais non ! Comme la plupart des chauffeurs, Norman Stigant a une excellente mémoire visuelle.
Il se souvient parfaitement de ce couple à l’allure pudibonde, elle avec sa robe en lin en dessous de la cheville, et lui avec ses grosses lunettes de vue et ses airs de médecin de campagne. Dans le bus, les autres voyageurs déjà confortablement installés sur leurs banquettes commencent à émettre des signes d’impatience.
— Il est passé où, le chauffeur ?
— Je dois partir maintenant, j’ai mon check-out dans une heure !
— J’aurais dû louer une voiture !
Faisant les cent pas dehors, ignorant les remarques des passagers, Stigant commence sérieusement à s’inquiéter, refusant de bouger sans que le couple de ce matin ne soit de retour. Quand il remonte dans le bus, il est accueilli par des « hourra ! » avant de retirer les clés de contact et redescendre à nouveau sous les cris et les reproches.
Il part se renseigner auprès des différents membres des équipages stationnés sur place, auxquels il fait la description des Lonergan, mais apparemment, personne n’a vu le couple. Il part ensuite demander dans les cafés de la Marina, les restaurants, une salle de fitness, une boutique de souvenirs, une supérette, en vain. Personne n’a intercepté les Lonergan.
À 18 h 00, en désespoir de cause, Norman Stigant n’a d’autre choix que d’aller signaler l’absence des deux Américains au bureau de la compagnie des transports pour laquelle il travaille, puis prévient Corinne Scharenguivel, sa supérieure.
Cette dernière appelle à son tour le patron de l’Outer Edge.
— Jack Nairn, j’écoute !
— Madame Scharenguivel, directrice de la compagnie de bus BTS, je vous appelle au sujet de deux touristes venus de Cairns que l’un de nos chauffeurs a ramené ce matin et qui ont souscrit une excursion à bord de l’un de vos bateaux.
— Ils s’appellent comment ?
— Thomas Joseph Lonergan et Eileen Cassidy.
— Attendez, ah oui ! Oui, je me souviens, des Américains, c’est bien cela ? Oui, bah, ils sont rentrés aussi avec tous les autres de l’expédition de ce matin, et sont probablement partis faire un tour ou boire un verre quelque part.
— Sans prévenir notre chauffeur ?
— Écoutez, je pense que vous êtes habituée à fréquenter les touristes aussi bien que moi, nous savons tous deux que ce genre d’attitude est très courante.
À 19 h 00, le bus conduit par Stigant consent finalement à démarrer en direction de Cairns, sans les Lonergan à son bord.
Dans l’hôtel de Cairns, un employé constate que les Lonergan ne sont pas rentrés de leur sortie et prévient la direction, cette dernière est formelle : ça sera une nuit de comptabilisée, ils auraient pu faire l’effort d’appeler avant quand même !
Muni d’un double des clés, le réceptionniste pénètre dans la chambre des Lonergan et constate que leurs affaires y sont encore en intégralité. Dans la salle de bains, il trouve des produits de toilette féminine, des caleçons d’homme séchant sous le ventilateur ainsi qu’une paire de lunettes de lecture posée sur l’une des commodes. Dans l’armoire, les deux valises du couple sont toujours là, grandes ouvertes.
Mais où sont-ils passés et pourquoi n’ont-ils pas emporté leurs bagages s’ils ne comptaient pas rester plus longtemps ?
Nous sommes le lundi 26 janvier 1998 à Port Douglas, où le bateau charter Outer Edge effectue une nouvelle excursion en suivant le même itinéraire que la veille. Le capitaine Nairn accueille aujourd’hui à bord des touristes italiens. Comme pour la veille, les plongeurs suivront le même cheminement et réaliseront trois sorties dans l’eau de trente minutes chacune avant de rentrer à Port Douglas en fin d’après-midi.
Au cours de cette journée, l’un des plongeurs italiens remonte à bord avec des plombs enrobés et une ceinture de lest (qui servent généralement de contre-mesure) et qu’il ne peut s’empêcher de montrer à l’instructrice Katherine Traverso, mais cette dernière se veut rassurante : il n’est pas rare que des nageurs perdent ce genre d’objets à cause de la pression de l’eau.
En fin de journée, quand le groupe italien quitte l’Outer Edge, l’équipage, fidèle à sa routine quotidienne, se met à faire le récurage du bateau et l’inventaire des objets trouvés à son bord.
À nouveau des oublieux : une paire de lunettes, un sac à main et une paire de chaussures de plongée. Le capitaine emporte le tout dans le hangar de l’agence pour les placer au milieu du bric-à-brac.
Les objets trouvés plus récents sont rangés dans un casier à part. En fouillant à l’intérieur, Nairn retrouve un sac en toile rayé que l’un des employés avait placé là la veille, c’est encore trop tôt, ses propriétaires vont sûrement finir par venir le chercher, pense-t-il.
Mais deux jours plus tard, en revenant d’une autre excursion, Jack Nairn remarque que le sac est toujours là et qu’il n’a pas été réclamé. La curiosité l’emporte, il s’empare du sac, ouvre le zip, et découvre l’improbable : un portefeuille contenant une centaine de dollars en liquide, deux cartes-clés de chambre d’hôtel, quatre MasterCard mais surtout deux passeports américains : les passeports des Lonergan !
Sans perdre un instant, il s’empare du téléphone et compose le numéro de l’hôtel où les Lonergan résidaient pour découvrir à sa grande frayeur qu’ils n’y sont pas revenus depuis déjà quarante-huit heures et que tous leurs bagages y sont encore !
Les idées commencent instantanément à s’entrechoquer dans la tête du capitaine Nairn et les scénarios les plus noirs commencent à lui traverser l’esprit : se peut-il qu’il les ait oubliés dimanche à la fin de l’expédition ? Pourtant, deux décomptages ont été faits pour s’assurer que tout le monde avait regagné le bateau !
Quelqu’un s’est-il trompé ? Il se souvient parfaitement que les vingt-six passagers récupérés sur le quai dimanche matin sont tous rentrés au grand complet ! Mais alors, comment expliquer le sac oublié avec l’argent et les pièces d’identité ainsi que l’absence à l’hôtel ?!
Une sueur froide lui traverse l’épine dorsale. Incapable de prendre une décision, il appelle la police et les recherches commencent le soir même, menées par les garde-côtes et la marine australienne. Elles durent ainsi pendant plusieurs jours sans succès. Le capitaine Nairn et ses hommes sont contraints d’annuler toutes les réservations en cours et de baisser le rideau de l’agence afin d’accompagner les enquêteurs lors de leurs allers-retours en haute mer.
Comment n’avoir pas remarqué l’absence de deux gilets de stabilisation, de plombs et de deux ceintures de lestage ? Aboie l’un des policiers.
Tout le récif de Saint Crispin est passé au peigne fin à l’aide de sonars et à grand renfort de plongeurs de la marine royale, qui finissent par revenir bredouilles. Pas de trace de Tom ou d’Eileen dans l’immensité aquatique.
À Port Douglas, la disparition des Lonergan est sur toutes les bouches et est le centre de préoccupation des locaux. L’ambassade américaine, qui a été prévenue entre-temps de la disparition en mer de deux de ses ressortissants, ne manque pas de pointer du doigt l’irresponsabilité de Nairn et ses hommes, un acte de négligence qui pourrait leur coûter cher, très cher !
Près de trois semaines après la disparition d’Eileen et Tom, des premiers indices finissent par apparaître d’eux-mêmes, recrachés par la mer.
Effectivement, le 2 février 1998, une tenue de plongée déchirée au niveau du fessier et des coudes (appartenant probablement à Eileen) est retrouvée au large d’une plage du Queensland. Trois jours plus tard, c’est au tour du dispositif de contrôle de flottabilité de Tom qui est découvert dans une plage d’Indian Head, à quelques kilomètres de Port Douglas.
Les déchirures sur la partie postérieure de la combinaison ont-elles été causées par des morsures de requins ?
Cinq mois plus tard, c’est une autre combinaison de plongée qui apparaît avec la mention « Tom Lonergan, Peace Corps, Fidji », et là, il n’y a plus de doute possible !
Après l’expertise scientifique des deux tenues de plongée, il est finalement démontré que les déchirures présentes sur les deux combinaisons ne sont pas dues à des dents de squales mais plutôt à des frottements avec les coraux. Mais pourquoi le couple Lonergan les a-t-il enlevées ?
Les explications sur le sujet restent vagues : une crise de délire traumatique, des picotements dus à l’introduction du sel sous l’étoffe ou qu’elles ont fini par leur donner chaud pendant la journée, sachant que le soleil tape fort et que la température de l’eau est toujours tiède.
Malgré des conditions climatiques clémentes qui auraient empêché ou du moins retardé toute forme d’hypothermie, le couple a probablement succombé à la déshydratation, n’ayant pas prévu l’issue fatale de l’aventure.
Interrogée par les policiers, l’instructrice principale de l’Outer Edge, Katherine Traverso, raconte que lors de la troisième plongée, les Lonergan ont longuement négocié auprès d’elle pour s’éloigner du groupe et faire « leur propre truc » pour répéter leur propre formule. Elle dit qu’Eileen Lonergan lui a montré leurs certificats PADI, attestant de leur longue expérience dans le domaine et de leur capacité à nager à contre-courant.
Fin juin 1998, une deuxième ceinture de lestage est retrouvée sur un rivage de Port Douglas. Mais la découverte la plus glaçante est certainement celle trouvée à 100 km au nord du spot de Fish City, plus précisément à Cooktown où une ardoise de plongée est répertoriée par un pêcheur et emmenée illico aux autorités.
Dessus, un message contenant diverses indications et techniques de respiration, probablement griffonné par Tom Lonergan pendant la première partie de l’excursion, mais surtout, il y a cet SOS qui date du 26 janvier 1998 :
« Lundi 26 janvier 1998, 8 h 00 du matin. À toute personne susceptible de pouvoir nous venir en aide : nous avons été abandonnés par MV Outer Edge dans le récif d’Agincourt le 25 janvier 1998 à 15 :00. Pitié, que quelqu’un vienne nous sauver avant qu’il ne soit trop tard ! Au secours !! »
Source : adelaidenow
En se basant sur cette dernière information, on aura compris que les Lonergan ont bel et bien survécu pendant une nuit entière dans l’eau, mais pour le reste, les informations ne sont pas nettes. Sans leur gilet de stabilisation, sans leur ceinture de lestage et leurs plombs, ils auraient été incapables de flotter bien longtemps, et ce, même s’ils sont des nageurs émérites. Les vagues et les puissants courants marins auraient fini par les fatiguer physiquement et leur brouiller la vue.
Au bout de près de cinq mois de recherches ininterrompues, le seul constat auquel est arrivé la police australienne est que les Lonergan ont péri dans les eaux, probablement de soif ou d’épuisement, ou des deux à la fois.
Cependant, d’autres faits plus étranges encore vont faire leur apparition et remettre en question tout ce qui a été découvert.
Accusé de négligence et d’homicide volontaire, le capitaine Geoffrey Nairn est mis en détention provisoire en attendant son procès.
Les parents de Tom et Eileen Lonergan engagent conjointement un avocat de Melbourne et font savoir par le biais du coroner du Queensland, Noel Nunan, qu’ils souhaitent faire un dépôt d’accusation d’homicide volontaire fondée sur la négligence criminelle.
Lors du procès tenu à la cour pénale du Queensland, plusieurs témoins comparaissent, notamment des habitants de Port Douglas, des plongeurs expérimentés et connaissant bien le spot de Fish City où le couple a disparu, ainsi que tout un parterre d’experts océanographes.
En se basant sur les allégations de ces derniers, il est convenu que la moitié des requins de la planète, toutes espèces confondues, vivent dans les eaux australiennes, mais que la plupart sont inoffensifs et non dangereux pour l’Homme. Les combinaisons des deux disparus ne comportant aucune trace de dents ou de sang, l’attaque mortelle de squales affamés tend à être écartée.
Une allégation fortement contestée par Ben Cropp, un plongeur vétéran qui connaît la Grande Barrière de corail comme sa poche et qui déclare de ce fait que les Lonergan auraient bien pu être dévorés par des requins tigres.
Lors de son passage à la barre pour témoigner, il dit à ce propos :
« Les requins-tigres sont très prudents, ils tournent simplement en rond en observant leur proie, ils peuvent faire cela pendant une heure durant avant de se rapprocher, et je peux vous dire qu’aussi loin que vous puissiez nager, ils vous suivront pendant une heure entière avant d’arracher un morceau de votre chair. À partir de là, vous n’avez plus aucun espoir de vous en tirer ! »
Mais si les requins ont dévoré les Lonergan, comment expliquer que leurs gilets de stabilisation et leurs combinaisons soient revenus sans aucune trace de morsure, d’éraflure, de marques de dents ?
Graham Houston, l’avocat de Jack Nairn, a quant à lui d’ores et déjà préparé son système de défense. Pour disculper son client, il a réussi à mettre la main sur les journaux du couple. C’est à partir de ce moment que le procès prend une tout autre tournure.
Dans le journal intime de Tom Lonergan, un passage écrit le 3 août 1997, soit six mois avant les faits :
« Tel un étudiant qui vient de finir un examen, je sens que ma vie est à présent complète et que je suis prêt à mourir ! »
Deux semaines avant de quitter Fidji, sa femme emploie le même ton alarmant en écrivant dans son propre journal intime :
« Tom espère avoir une mort rapide et douloureuse, il espère que cela se produise le plus vite possible… Il a cette envie de mourir qui peut l’entraîner à commettre l’irréparable, ce qui m’effraie le plus, c’est que je ne serais pas étonnée d’en prendre part aussi… »
Un couple suicidaire qui a peaufiné son plan de mort commune des mois à l’avance ? C’est du moins ce que cherche à prouver l’avocat.
D’autres passages intimes de la vie du couple sont lus en public lors des audiences suivantes. On découvre alors que tout n’était pas rose dans la vie des Lonergan, et qu’ils étaient loin d’être les bénévoles parfaits de l’American Corps comme ils l’ont toujours laissé croire.
Eileen et Tom semblaient apparemment détester leur travail, détester leurs élèves, détester les Fidji qu’ils comparaient à un pays du tiers monde. Tom écrit même qu’il en a marre de jeter des perles au cochon, de partager son savoir avec des élèves qui n’en ont rien à cirer et sa femme renchérit en ajoutant que le bénévolat, c’est pour les cons ou les riches désœuvrés.
On découvre aussi que Tom souffrait visiblement de dépression et d’un trouble de la personnalité, une sorte de schizophrénie pour laquelle il prenait un traitement lourd. Dans l’une des pages de son journal, il laisse entendre que sa famille n’a jamais apprécié Eileen et que sa mère était contre leur union depuis le tout début.
L’impression que laisse cette lecture sur l’assistance est bouleversante : une relation dominé /dominant visiblement très malsaine semblait rythmer la vie du couple, une relation destructrice qui a sûrement abouti à un pacte suicidaire.
Dans le journal d’Eileen daté du 26 décembre 1997, on peut lire encore :
« Nos vies sont tellement entrelacées que je serais incapable de dire si nous sommes bien deux ou un seul individu. Je suis toujours Eileen, mais je suis principalement Eileen et Tom… Je ne saurais décrire cela avec des mots mais je dirais tout simplement que cela va au-delà de la dépendance, au-delà de l’amour… »
Pour l’avocat Graham Houston, le couple aurait tout organisé à la minute près pour concocter son suicide en mer. Selon lui, Tom Lonergan, à la demande de son épouse, l’aurait probablement étouffée avant de mettre fin à ses jours en se laissant couler, tout en prenant soin de retirer leurs combinaisons et le matériel de plongée pour laisser croire à un accident.
Une thèse appuyée d’ailleurs par le témoignage de l’instructrice de l’Outer Edge, Katherine Traverso, qui répète devant le jury les propos des Lonergan avant d’effectuer leur dernière sortie en mer : « Nous voulons nous éloigner du groupe pour faire notre propre truc. »
Cette ultime déclaration crée le scandale parmi les deux familles des disparus qui s’insurgent en déclarant que le procès est diffamatoire, humiliant et irrespectueux envers eux et envers leurs enfants disparus.
Parmi les témoins venus de Port Douglas, tous se rangent du côté du capitaine Nairn et son équipage.
En effectuant une vérification des comptes bancaires du couple, la police découvre que depuis le dimanche 25 janvier 1998, aucun prélèvement n’a été fait, de plus, ils ont laissé leurs passeports derrière eux et leurs polices d’assurance n’ont pas été encaissées.
À partir de là, une autre thèse tout aussi étrange surgit : hormis le suicide probable, les Lonergan pourraient avoir aussi brouillé les pistes en organisant carrément « une escapade » dans le but de se détacher de leurs vies d’avant ; ainsi, ils ont tout bonnement choisi de s’évanouir dans la nature, et à l’heure qu’il est, ils sont sûrement dans un pays étranger avec de nouvelles identités.
Le lendemain de leur disparition, le capitaine d’un autre bateau stationné à Agincourt Reef aurait déclaré que deux passagers en plus étaient à bord de son charter pendant le voyage du retour. En effet, ces deux mystérieux passagers ne s’exprimaient que dans un fort accent américain alors que le reste des passagers étaient tous soit Australiens ou Britanniques. Les Lonergan se sont-ils glissés parmi les passagers sans le faire savoir et sans attirer l’attention de l’équipage ?
Cette théorie sera considérée comme pas très plausible et sera rejetée lors des audiences suivantes.
Le témoignage percutant de la secrétaire de l’agence Outer Edge vient à son tour appuyer et la thèse du suicide et celle de la fuite maquillée en disparition. Cette dame d’âge mûr qui travaille dans l’agence de voyage depuis presque vingt ans jure que la veille de l’expédition, elle aurait reçu un appel téléphonique d’un homme insistant pour savoir si l’excursion du dimanche 25 janvier incluait un arrêt à Fish City.
L’homme s’exprimait avec un fort accent du sud des États-Unis et semblait agité à l’autre bout du fil, au point qu’il répétait la même question plusieurs fois de suite et qu’à la fin, croyant à un plaisantin ou un détraqué, elle a fini par lui raccrocher au nez.
Dans le reste du pays, d’autres allégations de témoins oculaires commencent à faire surface. En effet, certains racontent avoir carrément croisé les Lonergan dans des pubs et des restaurants les jours suivant « leur disparition », et ce, aussi bien dans une librairie de Sydney où ils ont acheté des recharges pour appareil photo et des cartes postales, que dans un hôtel à Darwin à plus de 3000 km de Port Douglas.
Où est le vrai du faux dans tout cela ?
À l’issue de son procès, Jack Nairn, le patron de l’Outer Edge, est acquitté une première fois lors de son jugement par le tribunal pénal australien. Il est rejugé une seconde fois par un tribunal civil qui le condamne à verser une amende de 28 000 dollars de dommages et intérêts pour avoir enfreint les règles de sécurité et pour négligence. Les autres membres de l’équipage seront condamnés entre cinq et dix mois de sursis pour les mêmes chefs d’inculpation.
Depuis ce drame, l’agence Outer Edge sera définitivement fermée au public et le bateau du capitaine confisqué par la marine australienne.
Depuis, au Queensland, des règles plus strictes en matière d’activité sous-marine ont été établies avec une attention accrue accordée au listing et au recensement des passagers à chaque embarquement et au débarquement depuis le port de plaisance jusqu’aux différents spots de plongée en haute mer.
Sur les sites communautaires américains comme Reddit, les avis divergent sur le sujet. Pour ses usagers, les extraits les plus controversés des journaux intimes du couple ont été expressément choisis par l’avocat Graham Houston dans le seul but de montrer le côté sombre et pathologique de leur personnalité.
Il sera d’ailleurs prouvé par la suite que le reste du contenu des deux journaux est purement routinier et sans équivoque. L’avocat savait donc très bien ce qu’il faisait en sélectionnant ces extraits, dans l’espoir de faire éviter la prison à son client et appuyer la thèse du suicide. Ce qu’il réussira à faire.
En Australie comme aux États-Unis, beaucoup restent persuadés que la disparition des Lonergan est purement et simplement accidentelle et que les seuls responsables de ce drame sont l’équipage du bateau qui les a emmené en excursion. L’ardoise avec le SOS de détresse est donc une preuve irréfutable que le couple se sentait en grand danger de mort et voulait qu’on vienne les secourir le plus rapidement possible.
L’affaire a fait un très grand bruit et déclenché une grande couverture médiatique. Cependant, les médias américains accuseront longtemps les autorités australiennes d’avoir voulu volontairement étouffer l’affaire dans un but économique : Port Douglas dépend exclusivement du tourisme, et l’idée selon laquelle des plongeurs auraient été oubliés dans des eaux infestées de requins par un équipage de bateau distrait et irresponsable aurait tout simplement fait fuir de futurs plongeurs et dissuadé d’autres touristes de visiter l’endroit.
À l’instar de l’affaire Lonergan, une autre affaire a agité les médias américains en 2010, lorsque Ben MacDaniel, un habitant de Miami âgé de trente ans, disparaît mystérieusement dans les eaux de Vortex Spring en Floride. Passionné de plongée sous-marine depuis son enfance, MacDaniel avait reçu son certificat PADI de nage libre et s’entraînait pour obtenir le certificat spéléo.
Le 18 août 2010, il effectue une première plongée dans une grotte sous-marine à Vortex Spring d’une durée d’une heure. Il en refait une autre plus tard dans la soirée vers 19 h 30, d’où il ne reviendra jamais. Ce n’est que deux jours plus tard que sa camionnette Dodge sera retrouvée sur le parking d’une supérette voisine. À bord, la police retrouve environ 700 dollars en espèces, le permis de conduire de Ben, un téléphone portable et une pile de magazines de plongée.
Les recherches pour retrouver le corps du disparu ont duré plus de quatre mois où l’ensemble des grottes sous-marines de Vortex Spring ont été passées au peigne fin sans succès. Seuls objets trouvés à l’entrée d’une de ces grottes, deux réservoirs d’air comprimé alors que normalement, une plongée de cette nature nécessite que les bouteilles soient remplies d’un mélange de gaz et d’oxygène.
En 2013, Ben McDaniel a été déclaré légalement mort par l’État de Floride bien que son corps n’ait jamais été retrouvé.
Source : mamamia
L’histoire romancée d’Eileen et Tom Lonergan a été adapté sur grand écran en 2004 dans le film « Open Water ». Le film a mis l’accent sur la malheureuse dérive du couple et une probable attaque de requins.
Le 25 janvier 1998, le couple américain Tom et Eileen Lonergan disparait mystérieusement, alors qu’il prent part à une excursion de plongée sous-marine au large des côtes australiennes.
Un mois plus tard, deux combinaisons de plongée et un message inquiétant font leur apparition au large d’une plage du Queensland : Oubliés en mer ? Dévorés par les requins ? Qu’est-il réellement arrivé aux Lonergan ?
Les sources :
- LA DISPARITION MYSTÉRIEUSE DES LONERGAN
- Tom et Eileen Lonergan
- hisparus en mer : le destin tragique des Lonergan
- Open Water: The Tragic Disappearance of Divers Tom & Eileen Lonergan
- Tom et Eileen Lonergan, perdus en mer
- Mystère d’un couple laissé dans les eaux infestées de requins
- Le procès de Lonergan en Australie
- Un mystère refait surface
- Abandonné lors d’un voyage de plongée et perdu pour toujours
- OUBLIÉS EN MER IL Y A 22 ANS, LES LONERGAN N’ONT JAMAIS REFAIT SURFACE
- La véritable histoire derrière ‘Open Water’
- Ben McDaniel
- Tom et Eileen Lonergan – Laissés en mer
See acast.com/privacy for privacy and opt-out information.