Nous sommes à Paris ce 9 Mars 1944 en pleine Occupation. Pour vous mettre plus dans le contexte, je vous invite à me suivre jusqu’au 16ème arrondissement, au 22, rue Lesueur, où de fortes odeurs nauséabondes incommodent le voisinage depuis des jours.
Les pompiers appelés en renfort, cassent une fenêtre et suivent la source de l’odeur qui les mène vers la cave d’un hôtel particulier. Le spectacle qu’ils découvrent est digne d’un roman d’épouvante : plusieurs cadavres dépecés ,sont amoncelés là, pêle-mêle, dans l’attente d’être jetés dans une immense bassine de chaux vive.
Les policiers arrivent à leur tour et découvrent dans un débarras, près de 72 malles et valises empilées les unes sur les autres, contenant des vêtements d’hommes et de femmes, des papiers d’identité, des accessoires, des fourrures, des bijoux et des chapeaux.
Maurice Petiot arrive et se présente : il est le frère du propriétaire de l’immeuble et il a une explication pour tous ces cadavres. Il se décrit comme fervent nationaliste et membre de la Resistance ! Les cadavres ? Des collabos et des SS ennemis de la France qui n’ont eut que ce qu’ils méritaient ! La police approuve et le laisse filer !
Source : lefigaro
Mais les policiers vont vite regretter de ne pas avoir gardé Maurice Petiot (qui est en réalité le docteur Marcel Petiot, qui a menti sur son identité). Car lorsque les autorités fouillent encore davantage ce logement qui sert de dépôt, ils découvrent notamment une sorte de prison mais surtout, à l’intérieur d’un cagibi, un véritable charnier humain.
Eh oui , ce que tout le monde ignorait sur le bon Docteur Petiot est qu’il avait aussi effectué de longs séjours en asile psychiatrique, avant de devenir un escroc hors pair, chef d’un faux réseau de passeurs destiné à évacuer des juifs fortunés, voulant éviter les camps de concentration ! À ses victimes, Petiot faisait miroiter l’Argentine comme future destination à condition de venir les poches pleines de billets et de diamants!
Pour tous ces malheureux, le voyage vers Buenos Aires s’arrêtera brusquement dans la cave, où les attendaient : injections de morphine, démembrement, puis chaudière ou bain d’acide !
Le docteur Petiot, c’était aussi plusieurs usurpations d’identité : tour à tour il se fera appeler Docteur Eugène, Capitaine Valéry, ou encore Wetterwald François !
Même devant le couperet de la guillotine, Petiot restera fidèle à lui-même : un mystère complet !
Les premières années de Marcel ¨Petiot se passent dans une tranquille petite bourgade d’Auxerre où il né le 17 Janvier 1897, et où son père est employé des postes. Rapidement mit en nourrice par sa mère comme il était de coutume à l’époque, l’enfant avait des tendances sadiques très tôt: à l’âge de 3 ans, il ébouillante un chat avant de l’étrangler.
De retour chez ses parents, il passe ses premières classes sans difficulté, il est même excellent élève, ce dont attestent ses bulletins de fin d’année. Pourtant c’est un garçon troublé, difficile, secret, terreur de ses camarades de classe. Il s’amuse à les effrayer avec un revolver chopé à son père, vole dans les cartables et fini même par mettre la main sur les mandats envoyés par la poste à leurs destinataires.
Il est prit sur le coup, passe par le tribunal pour mineurs et est renvoyé du lycée. Il prépare alors son baccalauréat à la maison aidé par un membre de la famille et le réussi haut la main. Il souhaite devenir médecin. Mais la Première Guerre éclate et il doit tout ajourner pour aller au combat. Une grave blessure à la jambe aura raison de sa carrière militaire.
Durant sa convalescence, Il tombe dans une profonde dépression ponctuée par des accès de rage imprévisibles suivis de périodes de léthargie. Les psychiatres le déclarent dément et il est interné dans un asile. Il est déclaré irrécupérable, incapable de mener un quelconque travail physique ou intellectuel. A sa sortie, il bénéficie d’une bourse d’invalidité
Entretemps, Marcel Petiot prépare son cursus de médecine et décroche même son diplôme en 1921 avec mention très bien. Il choisi une petite bourgade, Villeneuve-sur-Yonne pour exercer. Il s’installe dans une petite maison et y ouvre un cabinet.
Là, il se fait une promotion rentable : la clientèle ne tarde pas à affluer et il se révèle bon praticien ,aux grandes qualités humaines : il prend le temps de parler à chacun, se montre concerné par les plus défavorisés, refuse de toucher l’argent des patients pauvres. Sa réputation est excellente dans toute la ville.
Puis vient le mariage avec Georgette, fille d’un célèbre restaurateur parisien. Le couple s’entend à merveille et donne rapidement naissance à un petit garçon, prénommé Gérard. Entretemps, Petiot se fait aussi élire maire de Villeneuve-sur-Yonne avec l’approbation générale.
Tout semble se passer le plus parfaitement du monde, le couple mène grand train, dîne à Paris avec des personnalités politiques, achète du bien immobilier et des actions boursières.
Mais le côté sombre de Petiot finira par prendre le dessus : d’abord par une fraude sur l’assurance maladie, suivi d’un trafic de cartes de résidents étrangers, avant de voler carrément l’électricité de la ville, alors qu’il avait largement de quoi s’acquitter de ses factures.
Une histoire de mœurs apparait aussi dans la foulée : une petite bonne que Petiot avait engagée, est retrouvée morte, probablement enceinte de ses faits, qu’il se dépêchera de maquiller en suicide. Mais trop tard, la réputation du docteur est entachée, il est révoqué, démit de ses fonctions de maire et échappe de peu à la prison.
Craignant le scandale, Petiot déménage sa famille à Paris.
Il reprend alors le cabinet d’un ancien médecin à la retraite, situé rue Caumartin. Là encore, sa stratégie marketing se révélera avantageuse. Son prospectus de publicité vante ses qualités d’obstétricien et de gynécologue, capable de faire accoucher sans douleur, mais aussi capable de guérir la syphilis, la tuberculose, l’impuissance sexuelle chez les hommes et les cancers. Là encore, la cliente afflue, plus que jamais ! Il se fait alors appelé Docteur Eugène.
Petiot fait l’acquisition de d’autres biens immobiliers, dont plusieurs appartements à Paris.
Mais en 1936, alors qu’il passe à coté de la célèbre librairie Gibert Joseph, il vole un bouquin de l’étalage et le met dans sa poche. Le vendeur l’aperçoit et appelle la police, Petiot fait alors une confession : il est fou et souhaite être interné. Il reste 7 mois en hôpital psychiatrique et l’expertise des médecins le décrit comme dangereux pour lui-même et pour autrui. Néanmoins semblant aller mieux, il retrouve la liberté et retrouve à son cabinet où il continuera d’exercer jusqu’au début de la deuxième guerre mondiale.
Source : the-line-up
Durant cette période trouble, il achète encore un hôtel particulier situé au 22 rue Le Sueur. Dans son cabinet, Petiot devient également fournisseur d’ordonnances de complaisance pour patients drogués ou prenant de la morphine. Un certain Jean-Marc Van Brever, toxicomane, le dénonce pour ses faits. Il fini par disparaitre mystérieusement. Puis ça sera une autre patiente du docteur Petiot, morphinomane, qui disparait à son tour.
Son sadisme le fait tourner alors vers un nouveau trafic, celui-là même qui marquera un tournant dans sa vie et lui sera fatal. Nous sommes en 1942, les Nazis traquent tous les juifs de la capitale pour les envoyés dans des convois aux camps de la mort. Petiot se rend compte, qu’il a pour voisin de cabinet, un juif d’origine russe, Joachim Gushinov, exerçant le métier de fourreur.
Gushinov craint pour lui et pour sa femme et demande naturellement conseil à son voisin médecin. C’est alors que le docteur Eugène/Petiot invente cette histoire de filière vers l’Argentine : Il peut le faire passer sans encombre de l’autre côté de l’Atlantique, sa femme le rejoindra dés qu’il sera établit sur place. A la demande de Petiot, Gushinov liquide tous ses biens, réuni la somme de 300.000 euros actuels, et vient le retrouver tout seul à la nuit tombée à son hôtel particulier. Madame Gushinov recevra même une lettre de son mari quelques mois plus tard « Je suis à Buenos Aires, le voyage s’est bien passé, je t’attends ! ».
Je vous laisser imaginer ce qui est réellement arrivé au pauvre Joachim Gushinov !
Petiot, pour se faire aider dans ce nouveau trafic, aura recours à deux rabatteurs : un coiffeur, Raoul Fournier et un ancien musicien, Edmond Pintard, ce sont eux qui seront désormais chargés de faire « le recrutement »des victimes.
Hormis les voyageurs seuls, des « tarifs de groupe » et « tarifs familles nombreuses » sont alors proposés par le réseau ; de riches familles juives telles que les Braunberger, les Kneller, les Basch, les Woolf et les Stevens, chargés de tous leurs biens en liquide, disparaitront à tour de rôle dans l’hôtel particulier du docteur, sans laisser de trace.
Puis viendront les malfrats et les truands en cavale : François Albertini dit « Le Corse », Joseph Reocreux dit « Jo le Boxeur » et leurs petites amies Pauline Grippay dite « Paulette la Chinoise », et Claudia Chamoux dite « Lulu », puis Adrien Evestebegui « Le Basque « et Annette Petit pour ne citer qu’eux. Tous étaient persuadés qu’ils embarqueraient dans peu de jours pour l’Argentine.
Que faisait l’abominable Petiot de ces malheureux ?
Figurez-vous que quelques mois auparavant il avait entrepri des travaux dans la cave de son hôtel particulier. Un vrai cabinet de tortures équipé d’une chambre à gaz, d’une chaudière, d’un four relié à la cheminée principale, de portes calfeutrées pour étouffer les sons et les cris , tout un arsenal de couteaux et de limes, plus un débarras pour ranger toutes les affaires des victimes.
Dés leur arrivée, Petiot prenait chaque candidat à part, le mettait en confiance et lui injectait une forte dose de morphine. Puis procédait à son dépècement et sa crémation. Les familles quant à elles, passaient directement dans la chambre à gaz. Petiot avait installé un œilleton pour observer ses victimes agoniser derrière la porte. Les grosses sommes d’argent étaient quant à elles, soigneusement recueillies par lui. Un véritable butin fait de gros diamants, de billets de banques et même de lingots d’or !
Sauf que l’armée Allemande a commencé à recevoir des échos de cette étrange filière. Elle infiltre alors une taupe, un juif prisonnier, Ivan Dreyfus, qui devait partir dans le prochain convoi à Auschwitz Birkenau. Dreyfus aura juste le temps de prévenir Petiot que les SS arrivaient. Les deux hommes prennent ensemble la fuite. Ivan Dreyfus ne sera jamais retrouvé vivant.
Entretemps, la police interrogea les deux rabatteurs de Petiot qui le dénoncèrent, il est capturé et passe aux interrogatoires. Mais maigres la torture des officiers Nazis, il ne lâchera rien. Il est libéré en 1944 par la Gestapo car elle ne lui trouva aucun lien direct avec la Resistance.
De retour à sa cave, il se dépêcha de mettre le feu aux cadavres et effacer les derniers indices du carnage. La cheminée de l’hôtel particulier, du 22 rue Le Sueur, crachera donc pendant des jours une fumée d’une puanteur insoutenable. Le voisinage fini par alerter les pompiers qui pénétrèrent dans les lieux par le biais d’une fenêtre et découvrirent le cabinet de torture du Docteur Petiot. Une vision de cauchemar.
Lors de l’enquête qui va suivre, d’autres cadavres seront retrouvés plongés dans une bassine de chaux vive. On n’énumérera pas moins de 72 valises, 28 costumes d’hommes, 90 robes, 120 jupes, 21 manteaux, 57 paires de chaussettes, 43 paires de chaussures, sans compter les accessoires. Un mandant d’arrêt est lancé contre lui.
En cavale, Petiot infiltre pour un temps La Resistance sous le pseudonyme de « Capitaine Valéry ». L’enquête à son sujet et sa traque, il ne l’apprend que par le biais des journaux où on le surnomme « Docteur Satan ».
Il est finalement arrêté en 1946 juste après La Libération. Durant son procès, Petiot s’illustre par ses prises de tête, ses longs monologues, allant jusqu’a interrompre son avocat, Maitre René Floriot, pour lui corriger la tournure d’une phrase.
Source : curieuseshistoires
Malgré la plaidoirie de son avocat qui dura six heures, Petiot sera condamné à la peine capitale pour vingt-quatre meurtres, recèles, exercice illégale de la médecine, vols et guet-apens.
Le 25 mai 1946 à l’aube, il est guillotiné dans la cour de la prison de La Santé où il avait été incarcéré.
Les dernières paroles de Petiot furent destinées à son avocat, Maitre Floriot :
« Maitre, ne regardez-pas, ça ne sera pas beau ! »
Petiot fut un produit de son temps, qui avait bien profité du climat trouble de la guerre pour monter des scénarios d’une cruauté rare, dignes de la noirceur de son âme. Après son exécution, les gens chercheront désespérément son pactole qui jusqu’à ce jour, est resté introuvable ! Son célèbre œilleton est toujours exposé au Musée de La Police de Paris.
À ses victimes, Petiot faisait miroiter l’Argentine comme future destination à condition de venir les poches pleines de billets et de diamants!
Pour tous ces malheureux, le voyage vers Buenos Aires s’arrêtera brusquement dans la cave, où les attendaient : injections de morphine, démembrement, puis chaudière ou bain d’acide ! Le docteur Petiot, c’était aussi plusieurs usurpations d’identité : tour à tour il se fera appeler Docteur Eugène, Capitaine Valéry, ou encore Wetterwald François ! Même devant le couperet de la guillotine, Petiot restera fidèle à lui-même : un mystère complet !
Les sources :
- Marcel Petiot
- L’effroyable affaire du docteur Marcel Petiot
- Le docteur petiot
- Alain Decaux: L’affaire Petiot | Archive INA
- Enigmes de Vendée: Les crimes du Docteur Petiot
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